Quel rapport y a-t-il entre une famille et une équipe ? – 3

Dans deux premiers billets, nous avons suivi l’Américain Daniel Coyle, auteur de The Culture Code: The Secrets of Highly Successful Groups, dans lequel il recherche les clés des équipes ultra-performantes. Il a constaté que tous les groupes ultra-performants avaient tous en commun trois éléments-clés. Dans les deux premiers billets, nous vous avons présenté les deux premières de ces clés : Construire la sécurité et Partager sa vulnérabilité.

Quel rapport avec la famille, dont il est question dans le titre de ces billets ? Pour l’instant, toujours aucun.

Continuons à suivre Daniel Coyle et ses recherches sur les équipes ultra-performantes. Il a mis en évidence un troisième élément-clé.

Troisième élément-clé : Établir un but / un objectif / une mission / un projet / un rôle commun

L’idée consiste à fédérer un groupe de personnes vers un objectif commun – et cela fonctionne mieux lorsqu’il se présente sous la forme d’une histoire. Un exemple souvent cité est celui des deux tailleurs de pierre au Moyen-âge. Lorsqu’on leur demande ce qu’ils font, l’un dit « Je taille des pierres » et l’autre dit « Je construis une cathédrale ». Ils font le même travail, mais leur vision – et leur motivation – est complètement différente.

Comment faire pour délimiter ce but, cet objectif, cette mission ? En établissant des priorités dans le groupe ou l’équipe.

Lorsqu’on dirige une équipe, on pense souvent que les priorités sont claires, évidentes et n’ont pas besoin d’être spécifiées… Si c’est votre cas, vous vous trompez. Daniel Coyle raconte : « Il y a quelque temps, le magazine Inc. (un mensuel américain pour les entreprises en croissance rapide) a demandé aux dirigeants de 600 entreprises d’estimer le pourcentage de leurs employés qui pourraient nommer les trois principales priorités de l’entreprise. Les cadres ont prédit que 64% des employés pourraient les nommer. Aux résultats, seulement 2% ont pu le faire. »

Donc explicitez vos priorités, ou faites-les expliciter par votre équipe.

Mais combien de priorités devriez-vous avoir ? Et sur quelles priorités les équipes ultra-performantes se concentrent-elles ? La réponse est intéressante :

  • La plupart des équipes qui réussissent n’ont qu’un petit nombre de priorités (cinq, ou moins),
  • et la plupart mettent en tête de leur liste de priorités leurs relations au sein de l’équipe, c’est-à-dire la façon dont ils interagissent les uns avec les autres. Cela vous semble secondaire ou anecdotique ? Écoutons les chercheurs.
  • Et si l’équipe a une histoire, c’est encore mieux : d’où elle vient ; qui nous sommes ; ce qu’on y fait ; ce que nous défendons ; nos objectifs.
  • Autrement dit, le principal but ou projet de nombreuses équipes qui réussissent est de construire et de maintenir l’équipe elle-même. Si les relations sont bonnes au sein de l’équipe, tout le reste suivra.

Et si l’équipe a une histoire, c’est encore mieux : d’où elle vient ; qui nous sommes ; ce qu’on y fait ; ce que nous défendons ; nos objectifs.

Cela vous semble secondaire ou anecdotique ? Écoutons les chercheurs :

  • Qu’est-ce qui prédit le mieux le succès des relations amoureuses ? Ce n’est ni le sexe, ni l’argent, ni avoir les mêmes objectifs. Le chercheur John Gottman s’est rendu compte que le simple fait d’entendre comment le couple racontait l’histoire de sa relation amoureuse permettait de prédire avec une précision de 94% si le couple divorcerait ou non.
  • Quel est le meilleur indicateur du bien-être émotionnel de votre enfant ? Ce ne sont ni les bonnes écoles, ni les câlins ou les films de Disney. Des chercheurs de l’Université Emory ont découvert que, pour un enfant, connaître l’histoire de sa famille était le principal indicateur de son bien-être émotionnel.

****

Bon, résumons-nous : ce que font les équipes ultra-performantes tient en trois éléments-clés :

  • Construire de la sécurité.
  • Partager sa vulnérabilité.
  • Établir un but, un objectif, un projet, et l’ancrer dans une histoire vécue ensemble.

Quand on a tout cela, on crée une « culture » commune. Et cette « culture » a une efficacité incroyable, comme l’écrit Daniel Coyle : « Une culture forte augmente le résultat net de 756 % sur onze ans, selon une étude réalisée par Harvard auprès de plus de 200 sociétés. »

Mais j’ai gardé le meilleur pour la fin : Daniel Coyle, lors de tous ses entretiens avec toutes ces équipes ultra-performantes, a remarqué qu’un mot revenait souvent. Un mot que toutes ces équipes utilisaient pour se décrire : une famille

Daniel Coyle, avec humilité et humour, a donc appliqué à sa propre famille les trois principes détaillés ci-dessus : « À la maison, j’ai eu un comportement parental un peu différent : j’ai parlé moins et je me suis davantage concentré sur la recherche de moyens de créer de l’appartenance. J’ai d’ailleurs trouvé que jouer aux cartes est un des meilleurs moyens pour créer de l’appartenance… »

****

Donc, laissons les équipes ultra-performantes mettre en œuvre les trois choses simples décrites plus haut et gagner beaucoup d’argent ou de succès, et appliquons ces trois choses simples dans ce regroupement de personnes qu’est une famille :

  • faire en sorte que chacun se sente en sécurité émotionnelle,
  • savoir reconnaître et accepter nos faiblesses,
  • créer une histoire commune, avec des projets et des buts de qualité.

Et peut-être que le bonheur vous sera donné par surcroît.

Bruno Hourst

Ressources

The Culture Code: The Secrets of Highly Successful Groups
https://www.bakadesuyo.com/2018/03/best-teams/

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Tags: relations

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