Vous êtes enseignant ou formateur, et vous supportez mal les conversations parallèles entre élèves ou entre stagiaires. Ou vous supportez tout aussi mal que vos élèves (ou vos stagiaires) tapent allègrement sur leur smartphone en échangeant sur les réseaux sociaux, pendant que vous tentez laborieusement de leur apprendre le théorème de Thales ou le modèle de Bruce Tuckman sur les quatre stades de formation d’une équipe. Dans un cas comme dans l’autre, vous considérez que lorsque les élèves (ou les stagiaires) parlent entre eux ou échangent sur les réseaux sociaux pendant votre intervention, cela nuit à l’apprentissage. Si vous êtes enseignant, vous avez la possibilité de punir. Si vous êtes formateur, il vous faudra rechercher les trucs et astuces conseillés pour mieux capter l’attention de vos stagiaires.
Est-ce que ces conversations parallèles nuisent vraiment à l’apprentissage ? Peut-être que oui, peut-être que non. L’élève qui parle à son voisin tout comme le stagiaire impliqué dans les médias sociaux pendant votre cours sont sollicités tous deux par le même besoin humain : le lien social. Et, bien entendu, ce besoin de lien social est nécessaire même en dehors d’une salle de classe ou d’un lieu de formation.
Voyons cela du côté du cerveau : que se passe-t-il entre nos deux oreilles lorsque nous nous sentons connectés aux autres, et lorsque nous ne le sommes pas ? Que nous expliquent les chercheurs ?
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Même si les choses ont quelque peu évolué, cela reste vrai : aujourd’hui comme depuis des milliers d’années, les humains sont des créatures sociales qui dépendent toujours les unes des autres pour leur survie. Et le manque de lien social peut avoir des conséquences stupéfiantes. Petite plongée dans les recherches sur le sujet.
Douleur sociale et douleur physique
Les sentiments de douleur sociale et de douleur physique sont étroitement liés. Ils génèrent des cartographies presque identiques dans le cerveau.
Lorsqu’une personne ressent une douleur sociale (généralement provoquée par l’exclusion, le rejet, les taquineries, le harcèlement, etc.), elle ressent en fait une douleur physique. L’antidote n’est donc pas surprenant : la connexion physique (une main sur l’épaule, une étreinte, etc.) peut guérir la douleur sociale. Encore plus surprenant, l’inverse est également vrai : le lien social (le sentiment d’appartenance, le sentiment d’être accepté, respecté, etc.) peut aider à guérir la douleur physique. C’est ce qu’a montré la chercheuse américaine Naomi I. Eisenberger de l’université de Californie (Référence 1). Et Nathan Dewall, de l’université du Kentucky, a montré que certains médicaments, qui agissent pour réduire la douleur physique, réduisent également les sentiments de douleur liés à l’exclusion sociale (Référence 2), faisant ainsi un lien surprenant entre les deux types de douleur.
Trop de cortisol, hormone du stress
Des études de déconnexion sociale, liée aux sentiments d’exclusion, d’isolement ou de rejet, ont montré une augmentation des niveaux de cortisol dans le cerveau (Référence 3). Le cortisol est l’hormone impliquée dans le stress, et une trop grande quantité de cortisol est très mauvaise pour la santé physique et les capacités d’apprentissage. En excès, cela peut conduire à l’anxiété et à la dépression.
Une influence biologique sur le cerveau
Dans une étude publiée par la revue Social Cognitive and Affective Neuroscience, Peter Gianaros, du Département de Psychiatrie de l’université de Pittsburgh (États-Unis), nous explique (Référence 4) que les personnes qui ont le sentiment de ne pas avoir de statut social ont une réduction de leur matière grise ! Et si cela ne suffit pas à capter votre intérêt, sachez également que l’isolement social diminue également la neurogenèse (production de nouvelles cellules cérébrales) dans l’hippocampe des adolescents, une région du cerveau centrale pour l’apprentissage et le stockage de la mémoire (Référence 5). Donc si vous êtes enseignant, regardez-y à deux fois avant de punir cet élève qui parle avec son voisin : peut-être que cette conversation parallèle lui permet de maintenir son usine de neurogenèse en marche à plein régime – l’adolescence est la période de développement maximale pour la production de nouvelles cellules cérébrales.
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Une définition du lien social
Le lien social est souvent défini comme la perception d’appartenance, d’acceptation et de respect de la part de ses pairs. Lorsqu’une personne se sent socialement connectée à une autre, de l’ocytocine est libérée. C’est cette même substance chimique qui est libérée lorsqu’un bébé est physiquement proche d’un parent. L’ocytocine crée un sentiment de confiance sociale entre les personnes, qui a ensuite un impact sur leur sentiment de sécurité lorsqu’elles sont ensemble.
Quel est l’avantage du lien social ?
En réalisant une méta-analyse (Référence 6), Julianne Holt-Lunstad de l’université Brigham Young à Provo (Utah, États-Unis) a montré que les personnes ayant des relations sociales adéquates (en quantité et en qualité) vivent plus longtemps que celles qui ont peu ou pas de relations sociales. Par rapport au taux de mortalité, le fait d’avoir des relations sociales solides est équivalente à celle de l’arrêt du tabac. Et inversement, de mauvaises relations sociales sont plus préjudiciables à notre longévité que l’obésité.
Cela rejoint les études faites sur la solitude.
Mais revenons à ces élèves qui parlent en classe avec leurs voisins et qui sont si énervants pour l’enseignant. En quoi le lien social est vital à l’école ? Si vous voulez en savoir plus, suivez le lien.
Bruno Hourst
Ressources
1. The neural bases of social pain: Evidence for sharedrepresentations with physical pain
2. Acetaminophen Reduces Social Pain: Behavioral and Neural Evidence3. Toward a Neural Basis for Social Behavior
4. Perigenual Anterior Cingulate Morphology Covaries With Perceived Social Standing
6. Social Relationships and Mortality Risk: A Meta-analytic Review
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