La neurogenèse : des avancées spectaculaires de la recherche qui nous concernent directement


Depuis une vingtaine d’années, les avancées dans la connaissance de notre cerveau ont été immenses et sans précédent. Nous avons plus progressé en deux décennies qu’en deux siècles dans la compréhension de cet « organe-univers » d’une incroyable complexité qu’est le cerveau humain.

Parmi toutes les découvertes récentes, intéressons-nous à la neurogenèse  : la capacité du cerveau à créer de nouveaux neurones.
Commençons par un bref historique d’une histoire fascinante qui s’accélère chaque jour.

La croissance de nouvelles cellules cérébrales au cours de la vie a été suggérée pour la première fois il y a des décennies, en 1965, par Joseph Altman et Gopal Das, qui étaient parvenus à mettre en évidence la production de nouveaux neurones dans une zone de l’hippocampe. Mais personne n’a cru aux résultats de leur recherche. L’idée était trop éloignée des certitudes scientifiques de l’époque et il y avait de fortes critiques de cette « idée folle ». Sceptique, le Dr Pasko Rakic refusait encore avec véhémence, en 1985, que les humains puissent créer de nouvelles cellules cérébrales. En 1998, ce fut un coup de tonnerre dans le monde de la neurobiologie lorsque l’équipe du Suédois Peter Eriksson et de l’Américain Fred H. Gage démontra que de nouveaux neurones étaient effectivement produits, à partir de cellules souches, dans le gyrus dentelé (une région de l’hippocampe) de cerveaux humains adultes.

Depuis la fin des années 1990, les neuroscientifiques ont accumulé un nombre considérable d’études montrant la neurogenèse chez d’autres mammifères que l’homme, et ils ont découvert de nouveaux biomarqueurs qui, injectés dans le sang, permettent de voir et de quantifier la croissance de nouvelles cellules cérébrales.

En 1999, l’équipe de la neuroscientifique américaine Elizabeth Gould, de l’Université de Princeton, montra, chez l’animal, que l’importance de la neurogenèse était proportionnelle au degré de stimulation cognitive que l’environnement produit.
En 2000, le Suédois Peter Eriksson et l’Américain Fred Gage, travaillant au Salk Institute en Californie, publièrent une étude où ils démontraient que de nouveaux neurones sont générés dans le gyrus dentelé de personnes ayant jusqu’à 72 ans.

Enfin, en 2016, des chercheurs de l’Université belge de Louvain, menés par Peter Carmélite, ont découvert une pouponnière de neurones dans les méninges, couches de tissu protectrices qui enveloppent le cerveau. Cette découvert par cette équipe belge est passionnante dans la mesure où elle montre que ces cellules souches semblent être présentes dans plusieurs aires cérébrales et semblent également être capables de fabriquer de nouveaux neurones dans une autre région du cerveau que l’hippocampe.

En quoi sommes-nous directement concernés par ces recherches ?
D’abord, pour remettre en cause l’idée encore largement répandue que nous ne créons plus de neurones lorsque nous sommes adultes, que nous en perdons au contraire continuellement, ce qui expliquerait la baisse de nos facultés cognitives avec l’âge : c’est donc faux. Même les patients âgés atteints d’un cancer en phase terminale produisent de nouvelles cellules cérébrales.
Ensuite, pour confirmer que notre cerveau peut produire de nouvelles cellules cérébrales … tous les jours. En moyenne et d’après les études récentes, nous produisons de700 à 1400 nouvelles cellules cérébrales chaque jour.

Allons un pas plus loin : en quoi la neurogenèse est-elle importante pour nous ?
La neurogenèse se produit dans plusieurs régions du cerveau, et en particulier dans l’hippocampe. Rappelons que l’hippocampe est très impliqué dans l’apprentissage et la mémoire. Cela signifie que lorsque vous ajoutez de nouveaux neurones à cette zone du cerveau, vous vous aidez à mieux apprendre et à mieux mémoriser – les enseignants devraient être intéressés par ce fait. Et inversement, lorsque la neurogenèse est arrêtée (les scientifiques peuvent supprimer les gènes qui « activent » normalement la neurogenèse), les résultats d’études chez l’animal ont montré des déficiences telles que la dépression et des troubles cognitifs.

Et une dernière question : la neurogenèse est-elle variable ou fixée  ?
Est-ce que, quoi qu’il arrive et quoi que nous fassions, nous avons le même nombre de cellules cérébrales qui se créent chaque jour ?
Non, la production de nouvelles cellules cérébrales n’est pas fixe, elle peut être plus ou moins élevée selon les conditions. Mais nous pouvons faire en sorte de favoriser cette production.
Comment ? Cela sera l’occasion d’un autre billet

Bruno Hourst

Références
Jensen Learning
Une pouponnière de neurones découverte dans les méninges