Dans Au bon plaisir d’apprendre, il y a plus de 20 ans, je parlais de l’importance des émotions dans un apprentissage – j’y consacrais un chapitre entier. Peu d’enseignants étaient alors prêts à accepter que les émotions puissent jouer un rôle dans leur salle de classe.
Depuis, l’importance des émotions, autant pour apprendre à l’école que pour vivre sa vie d’être humain, est de mieux en mieux reconnue. De plus en plus d’aides ou de formations sont proposées par des organismes ou des personnes se disant – ou s’estimant – expertes en la matière, ce que l’on ne peut que souhaiter. Mieux-apprendre participe à cette démarche, en proposant le jeu de « 52 émotions à la carte » et son livret d’activités.
Et qu’en est-il à l’école ? Car il y a urgence : la violence, le harcèlement ou l’intimidation sont, entre autres caractéristiques, des problèmes relationnels auxquels il faut apporter des réponses relationnelles. Par quelles interventions éducatives positives peut-on développer des compétences sociales et émotionnelles ? Rechercher un climat scolaire positif implique de mettre en place des interventions qui permettront à l’ensemble des jeunes d’apprendre à mieux vivre ensemble.
Mais cela va plus loin que le « vivre ensemble ». De plus en plus de recherches ouvrent de nouvelles pistes, montrant que les compétences sociales et émotionnelles jouent un rôle essentiel dans le fait de réussir sa scolarité, de devenir un citoyen responsable et de trouver sa place dans le monde du travail.
Ces études montrent également que de nombreux comportements à risque (comme l’usage de drogues, la violence, le harcèlement ou le décrochage scolaire) peuvent être évités ou que les risques peuvent être réduits lorsque l’on cherche à développer des compétences sociales et affectives chez les élèves de manière globale et sur le long terme.
Je n’ai pas trouvé ce type de programme en France, cherchant à développer les compétences sociales et émotionnelles des enfants et des adolescents à l’école – ce qui ne signifie pas qu’il n’en existe pas.
Aux États-Unis, cette démarche est beaucoup plus claire. Les Américains appellent cela SEL (Social and Emotional Learning), traduit au Québec par ASE (Apprentissage socio-émotionnel). Ce type de programmes existe depuis suffisamment longtemps pour pouvoir être étudié par les chercheurs. Les résultats sont particulièrement frappants.
Une méta-analyse s’est basée sur 213 programmes de SEL en milieu scolaire, impliquant 270 034 élèves de la maternelle jusqu’au secondaire. Comparativement aux groupes témoins, les participants à un programme SEL ont montré une amélioration significative de leurs compétences sociales et émotionnelles, de leurs attitudes et de leurs comportements en classe, avec une réussite scolaire 11 fois supérieure aux élèves des groupes témoins. Ce qui fait dire à un responsable de l’étude que l’investissement est rentable : un gain de11$ pour 1$ investi, on peut difficilement faire mieux !
Cette méta-analyse a également relevé que les élèves participant aux programmes SEL, comparativement aux élèves qui n’y ont pas participé, ont également une capacité accrue à gérer le stress et la dépression, et une attitude plus positive envers eux-mêmes, envers les autres et envers l’école.
Une autre méta-analyse a été menée à l’Université de l’Illinois. Les programmes SEL ont montré chez les élèves des améliorations immédiates en santé mentale, en compétences sociales et en réussite scolaire, et l’influence positive de ces programmes sur les élèves continue pendant des mois et même des années.
En quoi consistent ces programmes SEL ? A suivre…