Le cerveau des enfants est modifié par une exposition intensive aux écrans

Les faits commencent – bien tardivement – à être admis : les écrans font du mal aux enfants. J’ai détaillé dans plusieurs autres billets toutes les conséquences négatives de l’exposition trop précoces et trop longues des petits enfants aux écrans. Des organismes réputés, comme l’Académie Américaine de Pédiatrie (American Academy of Pediatrics, ou AAP) préconisent de limiter l’utilisation par les enfants des médias sur écrans, mettant en avant des risques cognitifs et comportementaux. Mais la réalité reste accablante : une majorité d’enfants sont exposés trop tôt et trop longtemps aux écrans.

Dans une étude récente dirigée par l’Américain John S. Hutton, pédiatre au Children’s Hospital Medical Center de Cincinnati (États-Unis) et publiée dans la revue Jama Pediatrics, les chercheurs ont voulu savoir si l’exposition de petits enfants aux écrans avait une répercussion sur la structure-même du cerveau. Ils se sont intéressés à la « matière blanche », la myéline, qui enrobe les neurones et leur permet de mieux communiquer, en s’attachant particulièrement aux zones du cerveau dédiées aux compétences linguistiques.

Pour cela, ils ont mené leur étude sur 69 enfants de 3 à 5 ans (donc pré-scolaires) en bonne santé. Les enfants ont passé trois tests cognitifs (phonologie, vocabulaire expressif, compétences émergentes d’alphabétisation). Leur cerveau a été visualisé par imagerie et leurs parents ont rempli un questionnaire permettant de déterminer leur exposition aux écrans : accès aux écrans, fréquence d’utilisation, contenu consulté.

Aux résultats, l’étude a montré une corrélation entre une exposition forte aux écrans et une intégrité plus faible de la substance blanche dans les zones du cerveau reliées aux compétences langagières, ce qui signifie des connections nerveuses plus lentes. En pratique, les enfants qui passaient le plus de temps sur les écrans avaient les moins bons scores dans les différents tests de langage.Cela confirme biologiquement ce que d’autres études, plus comportementales, avaient montré : l’exposition des enfants aux écrans rend plus difficile le développement de leurs capacités langagières, ce qui se traduit le plus souvent par des difficultés dès l’entrée à l’école.

John S. Hutton conclue : « Ces résultats montrent l’importance de comprendre les effets sur le cerveau du temps passé devant les écrans, en particulier pendant les périodes de développement cérébral dans l’enfance, pour que les décideurs politiques et les parents puissent établir des limites ».

On ne peut, hélas, que constater la faible volonté des décideurs politiques à expliquer aux parents l’importance d’établir des limites concernant l’exposition des enfants aux écrans.

Bruno Hourst

Ressources

Associations Between Screen-Based Media Use and Brain White Matter Integrity in Preschool-Aged Children

Un usage intensif des écrans modifie la structure du cerveau des enfants